La Belgique condamnée par l’Union européenne pour sa fiscalité sur les immeubles étrangers
Par arrêt du 12 novembre 2020, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a condamné la Belgique à deux millions d'euros d’amende et 7.500 euros d'astreinte par jour en raison de sa fiscalité sur les immeubles étrangers.
La CJUE a condamné l'Etat belge à verser deux millions d'euros à la Commission européenne parce qu'il ne s'était pas conformé à un précédent arrêt qui condamnait la différence de traitement fiscal existant entre les revenus immobiliers perçus en Belgique et ceux perçus à l'étranger.
L’arrêt de la CJUE du 12 avril 2018
La justice européenne a suivi l’argumentation de la Commission et a considéré, par un arrêt du 12 avril 2018, qu’il existait une différence de traitement fiscal entre une résidence secondaire en Belgique, qui est taxée sur base du revenu cadastral, et une résidence à l'étranger, dont les loyers réellement perçus ou la valeur locative réelle sont taxés, selon que le bien est loué ou non (notons cependant que si l’immeuble est localisé dans un pays avec lequel la Belgique a conclu une Convention préventive de la double imposition, les revenus de cet immeuble ne sont pas taxés en Belgique mais ils interviennent pour déterminer le taux d’imposition moyen belge).
Comme le revenu cadastral belge est en principe bien plus faible que la valeur locative ou le loyer réel, il existe une différence de traitement qui nuit à la libre circulation des capitaux. Une résidence sur le territoire belge est fiscalement avantagée. Cette situation peut avoir pour effet de décourager les résidents belges à acheter des biens immobiliers à l'étranger.
Malgré cet arrêt du 12 avril 2018, la Belgique a maintenu son régime de fiscalité sur les immeubles étrangers.
Par un arrêt du 12 novembre 2020, la CJUE impose des sanctions pécuniaires
La CJUE a jugé, dans son arrêt du 12 novembre 2020, qu’"en n’ayant pas pris les mesures nécessaires que comportait l’exécution de l’arrêt du 12 avril 2018, le Royaume de Belgique a manqué aux obligations qui lui incombaient". Une telle condamnation constitue la dernière étape dans les procédures en manquement de l'Europe à l'encontre d'un État membre. L'amende et les astreintes sont des sanctions pécuniaires qui doivent inciter l’Etat concerné à appliquer rapidement l'arrêt auquel il ne s’est pas conformé.
Le ministre des Finances, Vincent Van Peteghem, a indiqué, dans un communiqué, que la Belgique allait se conformer à l’arrêt : "Une autorité ne peut gagner la confiance que si elle remplit ses obligations dans les temps. Dès que j'ai eu connaissance du dossier, j'ai chargé mon administration de trouver une solution. Je présenterai celle-ci au Conseil des ministres dans les prochaines semaines. Ceux qui possèdent un bien immobilier à l'étranger attendent depuis longtemps de la clarté. Je veux donc pouvoir la leur donner rapidement."
Vers une modification de l’imposition ?
La Cour de justice de l’Union européenne ne précise pas la manière dont la Belgique doit éliminer cette discrimination.
La solution la plus simple serait de calculer l’impôt sur les revenus immobiliers sur base de la valeur cadastrale du bien, comme cela se fait actuellement en Belgique. Cela impacterait par ailleurs peu de résidents belges, ceux-ci étant à peine 2% à posséder une résidence à l’étranger. Si cette solution semble être la plus simple en théorie, elle s’avère presque impossible à mettre en pratique étant donné que les états étrangers n’ont pas développé, dans leur droit interne, cette notion de « valeur cadastrale ».
Une solution plus facilement réalisable serait de calculer l’impôt sur les revenus locatifs des immeubles situés en Belgique sur base des revenus locatifs réels, tel que c’est le cas pour les biens immobiliers à l’étranger. C’est d’ailleurs le mode de calcul de l’impôt utilisé dans la majorité des pays de l’union européenne. Ce cas de figure aurait cependant un impact financier bien plus important sur les résidents belges que dans la situation théorique susmentionnée. Le nombre de belges ayant une résidence à l’étranger ne s’élève en effet qu’à 2% à peine.
A l'époque de l'arrêt initial, en 2018, le ministre des Finances Johan Van Overtveldt avait indiqué qu'il examinerait le texte mais avait d'emblée exclu que la solution passe par une hausse de l'impôt. Il semblerait donc que le gouvernement fédéral devra prendre, dans les prochaines semaines, une décision difficile pour se conformer à la jurisprudence européenne, sous peine de se voir infliger d’importantes astreintes.