Les nouvelles obligations légales du franchiseur dans les contrats de coopération commerciale en Belgique

Lorsqu'un franchiseur souhaite conclure un contrat de coopération commerciale, il est soumis à des obligations strictes en matière de transparence envers les candidats à la franchise. Un mois avant la signature du contrat, il doit fournir un Document d’Information précontractuelles (DIP) comportant plusieurs volets d’informations cruciales. Ce DIP permet aux candidats de mieux comprendre les conditions du partenariat, de mesurer les risques et de préparer leur engagement. 

1. Les informations à fournir dans le DIP

Dans la loi du 9 février 2024, entrée en vigueur le 1er septembre 2024, le législateur a complété les mentions que devait obligatoirement contenir le Document d’Information Précontractuelle sous peine de nullité. 

1.1. Nature de l’accord et conditions contractuelles

Le franchiseur doit préciser si l'accord est lié à la personne du franchisé (si la personnalité ou les compétences de ce dernier sont prises en compte). De plus, la durée de l'accord, ses conditions de renouvellement et de résiliation ainsi que les conséquences financières associées doivent être clairement mentionnées. 

1.2. Rémunération et coûts

Le DIP détaille la rémunération directe que le franchisé devra verser au franchiseur, ainsi que le calcul de toute rémunération indirecte, avec une indication de son mode de révision. Les coûts de démarrage (marketing, formation, informatique, etc.) à la charge du franchisé, ainsi que leur éventuelle modification au cours du contrat, doivent également être précisés. 

1.3. Exclusivité et non-concurrence

Le franchiseur doit indiquer s'il bénéficie d'une exclusivité et détailler les éventuelles clauses de non-concurrence. Celles-ci concernent la durée, les conditions de leur application et les conséquences en cas de non-respect. 

             1.4.  Limites d’utilisation des droits et des données

Les restrictions quant à l'utilisation des droits de propriété intellectuelle du franchiseur sont encadrées, notamment en ce qui concerne la vente en ligne et la promotion numérique. Le DIP inclut également des restrictions sur l'accès et l'utilisation des données clients pendant et après la durée du contrat. 

1.5. Obligations financières et commerciales

Le franchiseur doit informer le franchisé de toute obligation liée à la réalisation d'un chiffre d'affaires minimum ou d'achats obligatoires, ainsi que des sanctions en cas de non-atteinte de ces objectifs.

 2. Nouvelles exigences depuis l’arrêté royal du 11 septembre 2024

Un arrêté royal publié le 11 septembre 2024 a ajouté plusieurs nouvelles obligations à ce document précontractuel. Les articles ajoutés (points l à o) visent à clarifier certains aspects.  

 Notamment : 

  • Projets d'expansion : le franchiseur informe le franchisé de ses plans de développement dans la zone de chalandise du franchisé. 

  • Concurrence locale : le franchiseur informe le franchisé de l’état de la concurrence locale. Les demandes de permis d'exploitation ou d'implantation de points de vente concurrents, si cette information est disponible. 

  • Investissements récurrents : Si des investissements récurrents sont attendus, les montants de ces investissements doivent être communiqués au franchisé.  

  • Compte d'exploitation prévisionnel : le franchiseur fournit un modèle de prévisions financières sur trois ans pour aider le franchisé à établir ses propres comptes 

 3. Compte d’exploitation estimé : une nouvelle obligation clé

La nouveauté la plus marquante introduite par cet arrêté royal est l’obligation, pour le franchiseur, de fournir un compte d’exploitation estimatif sur une période d’au moins trois ans. Ce compte permettra au candidat franchisé de se faire une idée réaliste des revenus potentiels de son activité. 

Jusqu’à présent, le franchiseur se contentait de fournir des données pour que le candidat établisse son propre plan d’affaires. À partir du 1er mars 2025, il sera de la responsabilité du franchiseur de préparer ce compte estimatif, une obligation qui entrainera des discussions sur sa responsabilité en cas de non-atteinte des objectifs financiers, même si l’arrêté Royal dispose clairement qu’il ne s’agit pas d’une obligation de résultat. Il est donc essentiel que les franchiseurs soient prudents dans l’élaboration de ces projections. 

4. Perspectives et implication

Ces nouvelles obligations renforcent la protection des candidats à la franchise en Belgique, en leur permettant de mieux évaluer les conditions du partenariat commercial avant de s’engager. Cependant, ces mesures suscitent également des interrogations, notamment sur la définition imprécise de certains termes, comme la "zone de chalandise" et les "investissements habituels dans le secteur", qui peuvent prêter à confusion. 

De plus, l’obligation de fournir un compte d’exploitation estimatif soulève des questions quant à la responsabilité du franchiseur. Il est probable que cela devienne un sujet de contentieux dans les années à venir, surtout en cas d'écart important entre les prévisions et les résultats réels. 

En somme, le législateur souhaite que les franchisés soient non seulement informés des dispositions contractuelles de l'accord, mais aussi qu'ils reçoivent des données économiques et financières suffisantes pour leur permettre d'évaluer correctement leur dossier.

5. Un cadre large

Les obligations d'information ne s'appliquent pas seulement aux contrats de franchise, mais à toutes les formes d'« accords de coopération commerciale ». Un accord de coopération commerciale existe dès lors que l'une des parties à l'accord accorde à l'autre le droit d'utiliser une formule commerciale pour vendre des produits ou fournir des services. Des éléments tels qu'un signe commun ou un nom commercial, un transfert de savoir-faire et/ou une assistance commerciale ou technique indiquent une « formule commerciale » au sens de la loi. 

Nous sommes donc dans un cadre bien plus large que le seul domaine des franchises.

 6. Sanctions

Les obligations ajoutées par l’arrête royal du 11 septembre 2024 seront d’application le 1er   mars 2025, en cas de non-respect de ces obligations, la nullité du contrat de coopération commerciale pourra être invoquée. 

 Pour plus d’information, veuillez contacter notre département commercial.  

Sarah Magerat